DERNIERS ARTICLES

LE CLOS NAPOLÉON : NAISSANCE D’UN MONOPOLE

S’il est un restaurant bien connu à Fixin, le « Clos Napoléon » est aussi un des cinq 1er crus de Fixin. Aujourd’hui exploité par le Domaine Pierre Gelin, le Clos Napoléon – qui doit son nom à Claude Noisot, commandant de Napoléon I – avait comme ambition de réunir l’ensemble des parcelles du lieu-dit « Aux Cheusots » en une seule et même propriété.

Charlotte Fromont revient pour nous sur les stratégies d’acquisition et de vente des différentes parcelles du lieu-dit « Aux Cheusots » qui constitueront pratiquement le climat « Clos Napoléon » d’aujourd’hui.

Nommé ainsi par l’histoire, ce monopole est l’illustration d’un mouvement de regroupement parcellaire, mettant en perspective la notion de « terroir » au XIXe siècle.

 


Etude de l’évolution parcellaire du lieu-dit Aux Cheusots bénéficiant de l’appellation d’origine contrôlée « Clos Napoléon »

 

par Charlotte FROMONT

 

Cette étude porte sur l’évolution cadastrale des climats et des lieuxdits qui composent l’aire d’appellation actuelle « Fixin 1er cru Clos Napoléon » depuis la création du cadastre à l’époque napoléonienne.

 

I. Introduction à la notion de monopole

 

L’indication de monopole ne fait pas partie des mentions obligatoires relatives à l’étiquetage des vins. Le terme n’étant pas réglementé, on peut voir dans la dénomination plusieurs applications. La définition du terme[1. Dictionnaire de la langue française, Paris, Flammarion, 1999, p. 802] est la suivante :

  • « privilège de fabriquer, de vendre certaines choses, que possède à l’exclusion de tous autres, un individu, un groupement d’individus ou l’Etat ».
  • « Sur un marché, situation où l’offreur est seul, et n’est donc pas soumis à la concurrence. »

 

Selon ces définitions, on comprend aisément qu’un individu, propriétaire en intégralité d’un lieu-dit ou d’un climat composant la totalité d’une appellation, puisse revendiquer cette dernière en monopole. Il arrive également qu’au sein d’un même lieu-dit divisé entre plusieurs propriétaires, seul l’un d’entre eux revendique l’appellation et indique alors la mention de monopole. Cette variante est donc d’ordre purement commercial. On en comprend facilement les enjeux.

Pour l’étude qui nous occupe, nous entendrons par monopole la propriété seule et entière de l’intégralité des parcelles d’un lieu-dit ou d’un climat, composant en totalité une appellation définie, par un individu ou un groupement d’individus qui exploitent lesdites parcelles.

En effet si l’on veut que le terme de monopole soit une composante d’identité et de valeur, il ne peut y avoir d’ambiguïté.

 

Prenons l’exemple d’une parcelle P qui composerait l’intégralité d’un climat que l’on appellerait clos Y bénéficiant seul d’une appellation définie Z 1er cru Clos Y. Supposons par ailleurs que le propriétaire n’exploite pas directement ses vignes mais qu’elles soient mises en métayage. En conséquence, à défaut d’accord entre les deux parties, l’exploitant et le propriétaire – qui reçoit chaque année, pour notre exemple, la moitié du produit de ses vignes – peuvent tous deux revendiquer l’appellation. Dans ce cas, la mention de monopole n’aurait plus de raison d’être. En revanche, si cette même parcelle était en fermage, l’exploitant locataire, étant seul sur l’appellation, pourrait utiliser la mention de monopole.

Dans le même esprit, si notre propriétaire exploite lui-même sa parcelle mais revend une partie, soit de ses raisins, soit de son moût, là encore la mention de monopole serait inadaptée.

De même, si l’aire d’une même appellation est divisée entre plusieurs exploitants, on ne peut plus considérer que l’appellation soit en monopole, même si un seul des exploitants revendique l’appellation. En poussant la réflexion plus loin, chaque propriétaire ou exploitant locataire a le monopole de sa parcelle et pourrait par conséquent, en toute légitimité, revendiquer le monopole de la ou des parcelle(s) exploitée(s) en les mentionnant sur les étiquettes. Pour cette raison, il faut sans doute s’attacher à adopter comme définition de monopole la propriété et l’exploitation seules et entières de la ou des parcelles d’un lieu-dit ou d’un climat, composant en totalité une appellation donnée, par un seul individu ou un seul groupement d’individus – une Société civile immobilière (SCI) par exemple. On pourrait néanmoins admettre une exception à cette règle dans le cas où une zone délimitée, classée dans une aire d’appellation donnée, comporte plusieurs propriétaires mais n’est exploitée que par un seul d’entre eux en raison de l’absence de vignes sur les parcelles du ou des autres propriétaires. Prenons un exemple : un bois constituant une parcelle P1 appartenant à la commune A et étant situé sur l’aire d’appellation A 1er cru clos Y. La parcelle P2, plantée de vignes sur cette même zone d’appellation et exploitée par un seul individu ou groupement d’individus pourrait donc revendiquer le monopole puisqu’il n’y a aucune autre possibilité de revendication de cette appellation. Mais si un jour les arbres étaient arrachés et la parcelle P1 plantée en vignes, les vins issus de la parcelle P2 ne pourraient donc plus se revendiquer en monopole. Il ne s’agit là, bien entendu, que d’une réflexion préalable et théorique. Les lignes qui précèdent n’ont pas de valeur juridique, aucune réglementation n’existant en la matière.

 

II. Regroupement parcellaire

 

Du point de vue législatif, le lieu-dit Aux Cheusots, section AN, parcelle n° 149 et la parcelle n° 40 section AN du climat Au village sont les deux seuls à pouvoir revendiquer, aujourd’hui, l’appellation « Fixin 1er cru Clos Napoléon ». Ces deux parcelles appartiennent au même domaine et composent à elles seules l’intégralité de l’appellation « Fixin 1er Cru Clos Napoléon ». Nous sommes donc en présence d’un monopole.

L’unité du lieu-dit Aux Cheusots s’est opérée sur une centaine d’années. Ainsi qu’on le voit apparaître sur d’autres climats de la Côte de Nuits[2. Archives de la mairie de Chambolle-Musigny, matrices cadastrales.], il semble que la plupart des propriétaires du XIXe siècle aient eu la même volonté de regroupement de parcelles au sein d’un même climat ou lieu-dit. Le vignoble tend ainsi vers une cohésion des terroirs au cours du XIXe siècle. A la fin du siècle, si le morcellement est encore présent au niveau du découpage parcellaire, il a tendance à s’amenuiser considérablement du point de vue de la propriété.

Le lieu-dit Aux Cheusots en est un exemple flagrant.

 

III. Le remembrement cadastral du milieu du XXe siècle

 

Le visage cadastral n’a pas bougé entre son établissement en 1828 et le remembrement opéré dans les années 1960. La superposition des deux plans cadastraux permet de mettre en évidence une vraie volonté du cadastre de morceler au minimum l’espace, regroupant, si besoin est, des parcelles voisines, appartenant au même propriétaire, quand bien même elles ne feraient pas partie du même climat ou lieu-dit.

Sans vouloir en tirer de conclusion hâtive – car il faudrait terminer ce travail de fond sur le parcellaire en le mettant en parallèle avec les archives de l’Institut national des appellations d’origine (INAO) –, on peut néanmoins se demander si la notion de terroir était aussi présente au milieu du XXe siècle qu’elle ne l’est aujourd’hui et qu’elle semble l’avoir été tout au long du XIXe siècle.

 

IV. Du lieu-dit Aux Cheusots au Clos Napoléon

 

Le “label” Clos Napoléon est une création de Claude Noisot[3. LUCAND (Christophe), « Le “Clos Napoléon” du rêve impérial à la naissance d’un cru de Fixin », Bulletin de liaison [du Centre d’histoire de la vigne et du vin], n° 11, novembre 2005, p. 7-10.], propriétaire de parcelles dans le lieu-dit Aux Cheusots, grâce à l’apport de son épouse tout d’abord, puis par rachat et échanges d’autres pièces de vignes. La dénomination Clos Napoléon s’est étendue au fil du temps au reste des parcelles du lieu-dit Aux Cheusots et a finalement été officialisée par l’INAO. Néanmoins, en l’état actuel de nos recherches, il est difficile de savoir avec précision à partir de quand cette nouvelle dénomination de Clos Napoléon a englobé l’ensemble du lieu-dit Aux Cheusots. L’étude des archives de l’INAO pourrait se révéler fructueuse pour en trouver l’origine exacte en tant qu’appellation officiellement admise.

D’un point de vue cadastral, il est intéressant de noter qu’il y a eu quelques évolutions au cours des 200 dernières années. Il suffit de regarder la superposition des deux plans cadastraux, l’actuel et celui dressé à l’époque napoléonienne.

 

Supperposition du cadastre actuel et du cadastre de 1828

Même si les changements sont “minimes”, on note tout de même l’extension de l’appellation « Fixin 1er Cru Clos Napoléon » du côté nord, là ou se trouve aujourd’hui la parcelle du lieu-dit Au village (A) qui bénéficie de l’appellation.

Le côté est a, quant à lui, été rogné très vite en ce qui concerne la partie notée B (4.75 a de superficie) ci-dessus. Il s’agit en réalité d’un échange fait par Claude Noisot en 1840 contre les parcelles n° 123 et n° 124 – couvrant respectivement 2.60 a et 2 a – ainsi que cela apparaît sur le registre cadastral[4. Claude Noisot (f° 193) ; Jean Valson à Fixin (f° 225).]. Au cours du XIXe et de la première moitié du XXe siècle, la parcelle n° 122P – notée B et passée chez Jean Valson après l’échange avec Claude Noisot – n’a jamais fait l’objet de tentative de rachat. On peut donc considérer que c’est dès 1840, date de l’échange, que la parcelle n° 122P sort de l’aire de la future appellation « Fixin 1er cru Clos Napoléon ». Au demeurant, sur le nouveau cadastre de 1913, la parcelle est notée en jardin et non plus en vignes comme cela était le cas auparavant. Est-ce la raison pour laquelle, lors du remembrement, la parcelle fut exclue de l’aire de l’appellation ? On peut en tout cas le supposer.

L’amputation de la parcelle n° 120 (D) est, elle, un peu plus récente. C’est en 1904 que la famille Joliet, propriétaire de la plupart des parcelles qui composent l’aire de l’appellation « Fixin 1er Cru Clos de la Perrière », rachète ces 50 ca qui composent la pointe de la parcelle n° 120. Mais, après le remembrement, cette toute petite partie du lieu-dit Aux Cheusots est administrativement engloutie dans l’aire de l’appellation « Fixin 1er Cru clos de la Perrière » et son nom cadastral d’origine disparaît par la même occasion. Il faut noter que, lors du rachat par la famille Joliet, les 50 ca sont encore notés comme étant plantés en vignes. Or, en 1913, lors de l’établissement des nouveaux registres cadastraux, la parcelle est notée en terre et non plus en vignes.

La création d’un chemin communal a également amputé, respectivement de 12 ca et de 10 ca les parties inférieures des parcelles n° 130 et n° 135 en 1855 (C).

En 1957, alors que la totalité des parcelles qui composent le lieu-dit Les Cheusots appartiennent dorénavant à un seul et même propriétaire[5. Archives départementales de la Côte-d’Or (désormais ADCO), 3P, cadastre de Fixin, matrice cadastrale des propriétés non bâties, XXe siècle, f° 578 (Gélin Pierre à Fixin, négociant en vin) et f° 796 (Mme Burtin Philibert née Fillon Jeanne nue-propriétaire au bourg).], la parcelle n° 130 est à nouveau amputée des 77 ca qui composent sa partie inférieure (E), située sous le chemin communal. Cette nouvelle division entraîne, du même coup l’exclusion de cette nouvelle parcelle de l’aire d’appellation « Fixin 1er cru Clos Napoléon ».

La parcelle n° 129 a elle aussi perdu sa partie inférieure (F). Néanmoins, la transaction est postérieure à l’établissement du nouveau cadastre dans les années 1960. La dernière mutation concernant la parcelle n° 129 qui soit notée sur la matrice cadastrale date de 1955[6. ADCO, 3P, cadastre de Fixin, matrice cadastrale des propriétés non bâties, XXe siècle, f° 578 (Gélin Pierre à Fixin négociant en vin).].

 

V. Naissance d’un monopole

 

L’état de section du début du XIXe siècle du lieu-dit Aux Cheusots montre que ce vignoble était relativement morcelé, comme nombre d’autres lieux-dits en Côte de Nuits.

Lors de l’établissement du cadastre, le lieu-dit Aux Cheusots couvre une superficie totale de 1 ha 83 a 70 ca. Il est alors divisé en 16 parcelles de tailles très diverses, la plus petite ne couvrant que 55 ca et la plus grosse comprenant 47.6 a [7. Archives départementales de la Côte-d’Or (désormais ADCO), 3P, cadastre de Fixin, état de section.] ainsi que le montre le tableau suivant :

 

Cadastre Fixin, lieu-dit Aux Cheusots Etat des propriétaires en 1828

Sur 16 parcelles, on compte 12 propriétaires différents.

En étudiant les changements de propriétaires parcelle par parcelle, on voit se profiler une unité de propriétés, sur la période allant de l’établissement du cadastre au milieu des années 1950, qui débouchera, à l’époque du remembrement, à la création d’une seule et unique parcelle sur le lieu-dit Aux Cheusots.

Cette figure présente l’état parcellaire du lieu-dit lors de la réalisation du cadastre en 1828.

 

La veuve Richard-Viennot possède les parcelles n° 121 et n° 122 qui couvrent une superficie totale de 61.9 a soit environ le tiers de la superficie du lieu-dit Aux Cheusots. C’est en 1834[8. ADCO, 3P, cadastre de Fixin, registres cadastraux du XIXe siècle, tome 1, f° 193.] qu’apparaît le nom de Claude Noisot sur les registres cadastraux en substitution de son épouse Madame veuve Richard-Viennot.

Les premiers rachats et échanges faits par Claude Noisot datent de 1840. A cette époque, il rachète à Jean Valson[9. ADCO, 3P, cadastre de Fixin, registres cadastraux du XIXe siècle, tome 1, f° 225.] la parcelle n° 129. Jean Valson est également propriétaire des parcelles n° 123 et n° 124 ainsi qu’on le voit en 1838.

 

Cadastre Fixin, lieu-dit Aux Cheusots Etat des propriétaires en 1838

Noisot récupère la parcelle n° 129 de Jean Valson et procède avec lui à un échange : les parcelles n°123 et n°124 couvrant un total de 4.6 a contre la pointe inférieure de la parcelle n°122 pour une superficie de 4.75 a.

 

Cadastre Fixin, lieu-dit Aux Cheusots Etat des propriétaires en 1840

 

Fixin, Lieud-dit Aux Cheusots - Etat du parcellaire en 1838 et en 1840

A partir de là, Noisot continue sa politique d’extension vers le sud de ses possessions dans le lieu-dit Aux Cheusots. Les achats de Noisot s’étalent entre 1840 et 1849.

En 1849, dans le lieu-dit Aux Cheusots, Noisot regroupe au total 94.7 a soit un peu plus de la moitié de la superficie totale du lieu-dit.

 

Cadastre Fixin, lieu-dit Aux Cheusots - Etat des propriétaires en 1849

Le Docteur Jules Lavalle parle du lieu-dit Echéseaux et Clos Napoléon d’1 ha 83 a 70 ca appartenant en grande partie à M. Noisot[10. LAVALLE (Jules), Histoire et statistique de la vigne et des grands vins de la Côte-d’or, 1855, rééd. Nuits- Saint-Georges, Fondation Geisweiler, 1972, p. 88.].

S’il est vrai que Noisot en possède une bonne moitié, la veuve du colonel Liégard avec 36.5 a en possède un cinquième. Vient ensuite Justin Villette. Ce sont là les trois plus gros propriétaires dans le lieu-dit.

 

Répartition des propriétaires Fixin Aux Cheusots (1849)

Après la mort de Claude Noisot en 1861[11. LUCAND (Christophe), art. cit. note 3.], la totalité des parcelles qu’il possédait dans le lieu-dit Aux Cheusots passe à un orfèvre de Dijon, Crétin Cholet. Les registres cadastraux mentionnent : « Crétin Cholet orfèvre à Dijon ». Celui-ci est ensuite domicilié à Fixin puis à Bordeaux. Charles Millot, loueur de voitures à Dijon rue Musette, remplace Crétin Cholet à partir de 1894. Il est ensuite dénommé rentier à Fixin. Les parcelles sont alors inscrites sous l’orthographe « aux Chézots » sur la matrice[12. ADCO, 3P, cadastre de Fixin Fixey, registres cadastraux du XIXe siècle, tome 2 (Fixey), f° 820.]!

 

Cadastre Fixin, lieu-dit Aux Cheusots - Etat des propriétaires en 1899

Dès 1872, Crétin Cholet poursuit l’œuvre de regroupement des parcelles en récupérant la parcelle n° 135. Suivent la parcelle n° 133 en 1873 et la parcelle n° 120 en 1882. Son successeur, Charles Millot, conserve le même objectif. Il rachète les parcelles de la veuve du colonel Liégeard (n° 130, n° 131 et n° 134)[13. ADCO, 3P, cadastre de Fixin, registres cadastraux du XIXe siècle, f° 113.] en 1897 et enfin la parcelle n° 132, la plus petite du lieu-dit, en 1899.

En dehors de la parcelle n° 122P, ancienne pointe inférieure de la parcelle n° 122 de Noisot, l’intégralité des parcelles est réunie au sein d’une seule et même propriété. Pourtant Charles Millot cède une partie de la parcelle n° 120 à Henri Joliet, docteur en droit à Dijon, en 1904.[14. ADCO, 3P, cadastre de Fixin, registres cadastraux du XIXe siècle, f° 118 ; registres cadastraux de 1913, f° 200.
]

 

Lieu-dit Aux Cheusots - Etat du parcellaire 1904

C’est le second morceau – d’une superficie de 50 ca – du lieu-dit originel qui sort définitivement de ce qui deviendra, de manière officielle après le remembrement, la parcelle cadastrée section AN n° 149. Sur le nouveau cadastre dressé en 1913, la parcelle n° 120P de la famille Joliet n’est plus plantée en vignes mais apparaît notée en « terre » sur le registre. On peut émettre l’hypothèse que c’est pour cette raison que le nouveau cadastre l’a englobée dans le Clos de la Perrière.

En 1955, Pierre Gélin[15. ADCO, 3P, cadastre de Fixin, registres cadastraux de 1913, f° 578.
], négociant en vin, devient propriétaire de l’ensemble des propriétés de Charles Millot sur le lieu-dit Aux Cheusots. Lui aussi pourtant se défait d’un morceau de l’une des parcelles. En 1957, la partie inférieure de la parcelle n° 130 est rognée de 77 ca qui sont vendus à Philibert Burtin[16. ADCO, 3P, cadastre de Fixin, registres cadastraux de 1913, f° 793.]. Là encore, cette partie n’a jamais réintégré l’actuelle aire de l’appellation « Fixin 1er cru Clos Napoléon ».

 

Lieu-dit Aux Cheusots - Etat du parcellaire 1957

 

VI. Aux Cheusots ou Echéseaux ?

 

D’un point de vue cadastral, on lit très clairement et très distinctement « Aux Cheusots ».

 

Plan cadastral du XIXe siècle Commune de Fixin, section B, lieu-dit Aux Cheusots Cliché de Charlotte Fromont

 

xtrait de l’état de section originel XIXe siècle Fixin, lieu-dit Aux Cheusots Cliché de Charlotte Fromont

Même si la racine latine est sans conteste la même que Echéseaux – casellum, casalis évoquant une habitation secondaire élevée sur un domaine et par extension, un groupe de constructions[17. LANDRIEU-LUSSIGNY (Marie-Hélène), Les lieux-dits dans le vignoble bourguignon, Marseille, Jeanne Laffitte, 1992, p. 88.
]–, il est intéressant de noter que le Docteur Lavalle[18. LAVALLE (Jules), op. cit. note 11, p. 88.]a choisi cette dernière orthographe que l’on ne trouve pas de manière écrite dans les sources fiscales.

Recherche d’identité ?

 

Si Claude Noisot est à l’origine du Clos Napoléon en tant qu’identité, il n’a pas eu la possibilité de mener à terme la politique qu’il semblait s’être fixée : réunir les parcelles du lieu-dit Aux Cheusots en une seule et même propriété.

Cette volonté de regroupement parcellaire, dans le but ou non de constituer un monopole, semble être une constante, en tout cas en Côte de Nuits, au cours du XIXe siècle. L’étude de l’évolution parcellaire du reste des climats permettra d’infirmer ou de confirmer cette tendance qui est à l’opposé de ce que l’on constate pour d’autre climats comme Le Clos de Vougeot qui, lui, est passé d’une seule entité à une multitude de propriétaires.

Cette juxtaposition finale des exemples du Clos de Vougeot et du Clos Napoléon permet de soulever une question historique majeure: de manière globale, le vignoble bourguignon du XIXe siècle est-il marqué par un morcellement ou un regroupement parcellaire ?

 

Charlotte FROMONT

 

3 Comments
  • PCT
    Répondre

    Je me suis demandé s’il est correct d’écrire (dans le titre de l’étude) que le Clos Napoléon est une appellation d’origine contrôlée. Je pensais l’AOC du Clos Napoléon était l’appellation communale FIXIN, ou éventuellement FIXIN PREMIER CRU. A ma connaissance seuls les grands crus, (Chambertin, Montrachet) sont une AOC à eux tout seul. Le Clos Napoléon n’est-il pas plutôt un Climat (répertorié comme tel dans le décret d’appellation) ?
    Il faudrait poser la question à Charlotte Fromont, ou à Sylvain Pitiot.

    Par ailleurs, excellente discussion de la notion de monopole appliquée au vignoble.

    25 janvier 2015 at 08:56
  • C’est tout à fait exact. L’appellation est bien Fixin, (Cahier des charges de l’appellation d’origine contrôlée « FIXIN » homologué par le décret n° 2011-1786 du 5 décembre 2011, JORF du 7 décembre 2011). L’article 3 du cahier des charges précise : 3°- Le nom de l’appellation d’origine contrôlée peut être suivi du nom d’un des climats énumérés ci-après, pour les vins répondant aux conditions de production fixées pour la mention « premier cru » dans le présent cahier des charges. Le titre de l’étude (réalisée en 2007) n’a pas été modifié. mais il est vrai que nous aurions dû y faire attention, puisque sur le cahier des charges « premier cru » devient une « mention ». Bien cordialement.
    Charlotte Fromont

    LISTE DES CLIMATS
    – « Clos de la Perrière » ;
    – « Clos Napoléon » ;
    – « Clos du Chapitre » ; – « Les Meix Bas » ;
    – « Arvelets » ;
    – « Hervelets ».

    25 janvier 2015 at 09:23

Post a Reply to Fromont Charlotte Cancel Reply